mardi 7 février 2012

La fraternité, quel intérêt ?


La fraternité, quel intérêt ?



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Tympan de l'église de Aups (Var) avec la devise de l'état français datant de 1905 apposée pour signifier que l'église appartient à l'Etat. 

                                                         La fraternité, quel intérêt ?

           « La Franc-maçonnerie est un ordre initiatique, traditionnel et universel, fondé sur la fraternité ».  (Proclamation de la GLDF à la première ligne du premier paragraphe du premier chapitre de ses constitutions.)

            Diantre! Ce doit être « fondamental » pour que d’entrée on  réserve à la fraternité cette place tout à fait capitale dans le texte, bien que d’une façon générale il faille se méfier des proclamations de notre vénérable obédience. On sait qu’elle n’est pas à l’abri d’une malheureuse contradiction. Rappelons pour l’exemple qu’elle n’impose aucune limite à la recherche de la vérité tout en proclamant l’existence du GADLU, qui de fait,  est une limite à cette recherche (conf. Annexe ci-dessous, ou voir le Knol: Å-propos-du-Grand-Architecte-de-l'Univers-(GADLU)). En effet, cette existence une fois proclamée, interdit toute investigation dans la partie du domaine de la pensée où le GADLU n’existe pas. Même l’hypothèse « GADLU=Ensemble vide » que j’avais envisagée dans une précédente planche pour contourner le problème, ne permet pas ces recherches puisqu’elles doivent être menées « en présence de l’Ensemble vide », ce qui est différent de «  hors de sa présence ». Cette incohérence qui serait anodine dans le monde profane, est gravissime dans un milieu qui utilise le symbolisme comme outil privilégié d’accès à la connaissance, car il est alors essentiel de garantir à chaque instant que la forme ne contredit pas le fond. Dans le cas d’espèce il y a contradiction. Il faudra que je revienne sur cette question dans mes prochaines planches, quels qu’en soient d’ailleurs les sujets, au moins jusqu’à ce que j’ai pu percevoir le début d’une explication satisfaisante pour mon esprit chagrin mais déterminé.

            Mais ne chinoisons pas, et essayons de comprendre les justifications, s’il y en a, de ce parti pris en faveur de la FRATERNITE, sentiment certes louable, mais peut-être illusoire. L’histoire nous apprend à travers de nombreux récits, notamment bibliques, que la fraternité entendue comme lien sentimental entre frères de sang, n’est pas à l’abri d’accidents de parcours. L’accident serait même bien souvent la règle, le drame étant au bout du chemin. Abel en sait quelque chose, et s’il pouvait faire connaître à l’humanité son sentiment à ce sujet, il dirait : « La fraternité, mon œil ! ». Pas l’œil qui était dans la tombe et regardait Caïn, mais le sien propre. Tout cela pour dire que les liens qui unissent frères et sœurs de sang ne sont pas à toute épreuve et peuvent difficilement servir de fondement inébranlable à quoi que ce soit de durable. Il y a toujours peu ou prou de jalousie, d’envie, de suspicion, voire de rancœur pouvant aller jusqu’à la haine, dans cette relation que les uns et les autres ne se sont pas choisie, mais que la nature par parents interposés a choisie pour eux. En Alsace, lorsque quelqu’un se targue d’avoir de bonnes relations avec ses frères et sœurs, on a coutume de lui demander : « Avez-vous déjà réglé la succession de vos parents ? » En général la réponse est : non, ceci expliquant cela.

            Alors donc cette fraternité là est trop friable pour constituer une assise sérieuse et solide permettant de fonder durablement une institution particulière comme la GLDF ou la Franc-maçonnerie plus généralement. L’expression « frère » ou « mon frère » que nous utilisons traditionnellement et couramment pour nous interpeller n’est pas un qualificatif évoquant un lien de sang, bien que ce lien puisse exister en parallèle dans certains cas, comme dans ma propre famille. En maçonnerie les frères se sont mutuellement choisis par la décision de présenter une candidature d’une part, et par la décision de l’accepter et d’y donner suite d’autre part.
            Ainsi la nature de la relation de fraternité au sein d’une loge n’est pas a priori entachée du virus de jalousie maladive citée plus haut. Ce qui ne veut pas dire qu’elle ne puisse pas y succomber au fil des années, au fur et à mesure que l’histoire commune entre frères se construit. Pour ne blesser personne et ne pas noircir le tableau de la loge je ne citerai aucun exemple de haine maçonnique, mais vous imaginez bien qu’on pourrait le faire sans difficulté aucune.


           Le fait que les frères maçons se soient mutuellement choisis donne un tout autre sens à la relation, et on peut légitimement se demander quel intérêt il y a derrière cette double démarche simultanée de demande et d’acceptation. Curiosité, jeu, stratégie en vue d’un objectif avoué ou non, désir d’accès à la connaissance, prise de pouvoir sur soi, sur les autres ou sur la société tout entière? On peut penser qu’il y a de tout cela chez chacun de nous, avec bien sûr son dosage et sa recette personnels. Mais une fois encore je dirai que ces motifs sont bien dérisoires et ne permettent en aucun cas de fonder une institution si minime soit-elle, alors à plus forte raison une institution aussi prestigieuse que la nôtre. J’y vois personnellement et pour l’heure un autre intérêt rarement évoqué.


            L’intérêt de survie. 

            De tout temps la préoccupation personnelle des individus a été de subvenir aux besoins essentiels de la vie courante. De personnelle elle est rapidement devenue familiale lorsque ces individus ont découvert la sécurité et le confort supplémentaires qu’offrait le groupe des ascendants et descendants immédiats, y compris l’échelon supérieur des grands parents, lesquels à l’occasion d’un décès pouvaient servir aussi de menu pour le repas de la circonstance. Outre la satisfaction rendue plus facile des besoins de la vie courante, le groupe constitué par les membres de la famille permettait de mieux préparer et de mieux garantir la satisfaction des besoins à venir. Il y avait un intérêt supérieur à considérer le groupe plutôt que l’individu. A l’aube de l’humanité manger était le seul impératif. Les périodes préhistorique et historique qui ont suivi ont ajouté à la conscience de l’immédiat, la notion de durée. Dorénavant pour survivre, et si possible dans un certain confort minimum incluant la sécurité, il faudra maîtriser l’espace et le temps. C’est ainsi que petit à petit la solidarité est apparue comme un moyen très efficace tout en étant économique, pour y parvenir. Contre vents et marées les alliances stratégiques et la mise en commun d’intérêts et de moyens permettent de gagner, donc de subsister dans l’adversité. Là où l’individu isolé se noie, le groupe soudé surnage et se sauve. Mais s’il y a plusieurs groupes en présence le problème se pose à nouveau. Tout est donc à recommencer.


            Cette fois l’adversaire, le concurrent, l’empêcheur de survivre en rond, n’est plus le voisin immédiat ou les éléments naturels, mais le groupe d’à côté, l’ethnie, la peuplade, la nation, la puissance ou l’obédience étrangères. La solution qui a fait ses preuves au niveau de la famille et du petit groupe  pourrait peut-être s’appliquer aussi avec bonheur en raisonnant au niveau de l’humanité entière. D’où l’idée qui a germé dans la tête des plus futés d’entre les humains, que la solidarité étendue à tous les habitants de la terre fait disparaître les adversaires potentiels. Ils n’y a plus personne à combattre et tout le monde est peinard. Toutefois la vigilance s’impose, il faut veiller à rester soudés, sous peine de voir renaître un adversaire au sein même du groupe car la jalousie qui a eu raison d’Abel prenait sa justification dans une soi-disant nuance d’appréciation divine au détriment de Caïn.
             Qui sait si notre GADLU imaginaire apprécie les faits et gestes des frangins ? Qui sait s’il n’est pas lui aussi, comme l’autre tout puissant, un semeur de zizanie entre les hommes ? L’existence proclamée du GADLU sans plus d’information à son sujet fait craindre le pire. D’autant plus que les attaques contre la laïcité se multiplient comme des lapins et que l’inquiétant retour du religieux actuel dans toutes les grandes paroisses monothéistes va à coup sûr réactiver les différents GADLU  qui se concurrencent sur le terrain de la discorde. Bonjour l’ambiance et les coups bas qui ont pour nom : fatwas, excommunications ou vocations sans appel aux gémonies. Peu importe que le principe créateur distribue ou non des bonnes notes, ce qui compte c’est ce qui est réellement dans la tête de ses ouailles. Tant que les ouailles pensent être notées elles rameront pour la meilleure note, quitte quelques fois à piétiner des cadavres.

            Pour ma part, par mesure préventive et dans un souci de réelle efficacité, je proclame l'inexistence de ce GADLU, et ce faisant je rends possible la solidarité universelle qui aurait pour nom FRATERNITE. C’est elle qui garantira la survie du clan que les Grecs appelaient PHRATRIE, concept récent au regard des millénaires d’existence de l’Homme, et tout à fait moderne dans le domaine de la pensée philosophique. En conclusion, pour en revenir au titre de ma planche : « La fraternité, quel intérêt ? » je réponds : l’intérêt supérieur bien compris de l’humanité, SA SURVIE, sans intervention d’un quelconque GADLU semeur de haine.

            Les individus, les groupes, fonctionnent et agissent par intérêt ; la Maçonnerie en tant que groupe n’y échappe pas. Elevée et étendue à l’humanité entière la fraternité est la solution qui peut éviter la mort de notre espèce. Du moins jusqu’à ce qu’apparaisse un ennemi supérieur d’ordre cataclysmique, surgissant du diable vauvert si vous me permettez cet oxymore ravissant. Cela s’est déjà produit dans des temps reculés. Les dinosaures en ont été les principales victimes. Statistiquement cela se reproduira. Å cet instant la fraternité sera illusoire, la mort des uns sera la vie des autres, comme les dinosaures ont cédé la place aux humains. Dans ce cas précis de grosses bêtes à petites cervelles ont été remplacées par des petits êtres qui ont fini par choper la grosse tête. Rien ne dit que cela se reproduira, tellement sont nombreuses les autres combinaisons. L’avenir du monde est peut-être dans l’une d’elles où il y aurait autant d’intelligence que d’amour, moins de grosses têtes mais des meilleures. On peut toujours l’espérer, c’est gratuit.

            En attendant ce grand chambardement à l’issue plus qu’incertaine, la fraternité peut encore servir. Alors servons nous en en la servant, mais les yeux grands ouverts, en toute lucidité. Un franc-maçon peut être un utopiste, c’est tout à son honneur ; mais si en plus il est naïf, alors c’est un con. Pour ce jugement abrupte mais fraternel quand même, à ce frère anonyme qui pourrait se sentir insulté, je demande pardon, bien que CON ne soit pas une injure dans mon esprit ni sur le bout de ma langue, non plus d’ailleurs que bitte ou zizi. Mais dans une obédience qui ne reçoit pas les femmes, cette précision est peut-être utile pour promouvoir la fraternité entre les humains de la planète entière.
            Je pense personnellement que la fraternité qui unirait tous les Hommes est vraisemblablement une illusion, mais si c’est sans les Femmes, c’est certainement une illusion.
                                                                                                          J’ai dit avec plaisir, le  28.11.2006.
ANNEXE:
Citation / GADLU
« La Franc-maçonnerie proclame, comme elle l’a proclamé dès son origine, l’existence d’un Principe Créateur, sous le nom de Grand Architecte de l’Univers. Elle n’impose aucune limite à la recherche de la Vérité………………………. »

Déclaration de principes du Convent de Lausanne du R…E…A…A… (Sept. 1875). 


Définitions tirées du dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française
                                        LE ROBERT (11 volumes- édition 1977).

-PROCLAMER : 1° Publier ou reconnaître solennellement par quelque acte officiel.
                         2° Par ext. Annoncer ou déclarer hautement, en recherchant le maximum d’effet auprès du plus vaste public.
-EXISTENCE : Le fait d’être, d’exister.
-EXISTER : Avoir une réalité.
-REALITE : 1° Caractère de ce qui est réel, de ce qui ne constitue pas seulement un mot, une idée, de ce qui constitue une chose.


Décodage personnel.

La GLDF reconnaît solennellement que le principe créateur qu’elle nomme GADLU, n’est pas seulement une idée, mais qu’il constitue une chose qui ne se discute pas. Si cela ne représente pas une réelle limitation à la recherche de la vérité, ça pourrait être quoi ?
Pour la réponse qui convient, consulter un Jésuite, ou aller sur: Å-propos-du-Grand-Architecte-de-l'Univers-(GADLU)
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